La gallinule

12 mai 2025

La gallinule est un petit être en robe noire à parement blanc. Avec humilité, avec modestie, mais avec opiniâtreté, elle accomplit son travail de gallinule, du soir au matin. Elle observe ce qui se passe autour d’elle. Parfois, elle gratte, elle donne quelques coups de bec. Elle se fond dans son environnement, en contribuant à l’équilibre de celui-ci.

Ce sont quelques traits communs, qu’en qualité d’autres êtres en robe noire à parement blanc, nous souhaitons développer au sein de notre cabinet.

Un client m’a dit un jour au téléphone, « je suis comme vous Maître, j’ai confiance dans la justice de mon pays ». J’ai marqué un temps de latence, qui l’a renseigné sur mon opinion.

Dans un dossier de concurrence déloyale, un autre client m’a produit les pièces d’un dossier antérieur qui l’opposait trente ans après au même adversaire. En novembre 1992, une assignation a été délivrée, qui a abouti à un jugement en mai 1993 et un arrêt en appel en novembre 1993. Ce délai d’un an appartient au passé. Aujourd’hui, il est probablement trois ou quatre fois plus élevé.

Ce n’est pas en phase avec la vie économique.

C’est la raison pour laquelle nous voulons développer les différents modes de règlement alternatifs des litiges, médiation, conciliation, arbitrage, audience de règlement amiable. Notre métier, il y a 30 ans, était de faire des recherches juridiques et de les défendre à la barre. Aujourd’hui, il est de rechercher une solution à un différend qui offre une sécurité juridique. Nous sommes une entreprise de juristes, associés, collaborateurs, assistantes au service des entreprises.

Illustration, en matière de concurrence déloyale, à nouveau. Une entreprise assigne un de nos clients au titre de la confusion, les deux dénominations étant identiques. Elle demande une interdiction d’activité et 100 000 € de dommages-intérêts. Sur ma proposition, mon client a ajouté à sa dénomination un suffixe et a sollicité une conciliation. En conciliation, la discussion a fait apparaître pour la partie adverse des préoccupations opérationnelles sur le plan numérique. Pour régler cet aspect, nous avons proposé de faire précéder notre dénomination sociale d’un préfixe. Un accord est intervenu, sans que notre client n’ait à régler quoi que ce soit.

Se fondre dans l’environnement des entreprises, en contribuant à leur équilibre, un travail d’être en robe noire à parement blanc, comme la gallinule.

Le Tribunal des affaires économiques (TAE)

12 mai 2025

La loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 institue à titre expérimental, à compter du 1er janvier 2025 et pour une durée de 4 années, un Tribunal des affaires économiques (TAE).

Le Tribunal des affaires économiques remplace dans 12 villes le Tribunal de commerce : Marseille, Saint-Brieuc, Nancy, Lyon, Le Mans, Paris, Le Havre, Versailles, Avignon, Limoges, Auxerre, Nanterre.

La création des Tribunaux des affaires économiques a deux principales conséquences :

  • Une compétence élargie pour les Tribunaux des affaires économiques
  • L’introduction d’une contribution pour la justice économique

1°) Une compétence élargie pour les tribunaux des affaires économiques

Les tribunaux des affaires économiques ont désormais compétence pour les procédures d’alerte, de prévention et de traitement des difficultés (« procédures collectives ») concernant les agriculteurs, les associations, les sociétés civiles, professions libérales. Auparavant ces procédures relevaient de la compétence du tribunal Judiciaire.

Restent de la compétence du Tribunal Judiciaire les procédures d’alerte, de prévention et collectives pour les professions juridiques et judiciaires règlementées (avocats, notaires, commissaires de Justice, greffiers, administrateur judiciaires, mandataires judiciaires)

Par ailleurs, les litiges en matière de baux commerciaux en lien avec une procédure collective et ayant un lien de connexité suffisant avec la procédure sont désormais de la compétence du Tribunal des affaires économiques.

2°) La contribution pour la justice économique

Depuis le 1er janvier 2025, une contribution pour la justice économique a été mise en place devant les tribunaux des affaires économiques pour le demandeur employant plus de 250 salariés si la valeur totale des prétentions est supérieure à un montant de 50 000 euros

Cette contribution peut atteindre 5% maximum du cumul des demandes.

Ne sont pas concernées par la contribution pour la justice économique :

  • le demandeur à l’ouverture d’une procédure amiable ou collective prévue au livre VI du code de commerce et au règlement amiable agricole
  • l’Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements
  • les personnes physiques et les personnes morales employant moins de 250 salariés
  • les demandes incidentes, de rectification, interprétation, vérification des dépens, d’homologation d’un accord amiable,
  • les demandes de modification, rétractation, contestation d’une ordonnance sur requête.

En pratique, le demandeur doit justifier de sa situation lors du dépôt de son assignation au greffe. Le greffe avise le demandeur avant la première audience du montant de la contribution. Le versement de la contribution est effectué au guichet du greffe ou, par voie électronique, sur le site www.tribunaldigital.fr.

La contribution est déposée sur un compte de dépôt dédié. Elle sera restituée dans l’hypothèse d’un désistement d’instance ou en cas de résolution amiable emportant extinction de l’instance ou de l’action.

À défaut d’avoir versé la contribution, le demandeur s’expose à ce que sa demande soit irrecevable.

La parabole du joueur de tennis en matière de prescription 

12 mai 2025

« Eloge de la prescription », « droit à l’oubli numérique », autant de revendications légitimes à une tranquillité gagnée avec le temps pour qui veut se faire oublier.

À l’inverse, celui qui demande réparation estimera que le temps est un allié précieux dont il ne veut rien perdre.

Chacun a des revendications légitimes, qui doivent être préservées bien que contradictoires. Un équilibre est à trouver. Comment cela se vérifie-t-il lorsqu’on est en présence de ventes successives d’un produit atteint d’un vice caché qui a été fabriqué, vendu à un grossiste, revendu à des intermédiaire puis à un utilisateur final ?

En droit, la prescription s’apprécie tant du point de vue de celui qui agit que de celui dont la garantie est recherchée. A la manière d’une balle de service au tennis, il faut vérifier que le pied du lanceur n’empiète pas la ligne de fond de court et il faut aussi vérifier que la balle arrive dans le carré de service. Si l’une ou l’autre de ces conditions n’est pas remplie, la balle est perdue.

  • Celui qui « sert la balle » est celui qui agit en garantie : son pied ne doit pas dépasser la ligne de fond de court, son assignation doit être délivrée dans le délai de prescription.

Ainsi, celui qui, le premier, a acheté au fabricant un bien dont il apprend plus tard (parfois des années après) qu’il est atteint d’un vice, dispose du délai de deux ans pour agir contre son vendeur.

Cependant, la loi (article 2224 du code civil) lui octroie le bénéfice d’un délai « glissant » : il ne peut agir que s’il a connaissance du vice et c’est l’assignation qu’il reçoit de son propre acquéreur qui ouvre le délai. Son droit à agir se trouve renforcé, puisque ce n’est pas la vente parfois conclue plusieurs années auparavant qui ouvre le délai. Il obtient une protection supplémentaire.

  • Celui qui « reçoit la balle de service » est le fabricant-vendeur : il recherchera si l’assignation lui est délivrée avant expiration du délai au-delà duquel il a droit à l’oubli pour essayer d’échapper à l’action en garantie.

Après beaucoup de tâtonnements, la jurisprudence est désormais fixée : le délai pour agir contre le fabricant-vendeur n’est plus de 5 ou 10 ans mais de 20 ans depuis la vente.  Autrement dit, ce n’est que si l’assignation en garantie qu’il reçoit est postérieure de plus de vingt ans à la vente, qu’il pourra la considérer prescrite. Cour de cassation, Chambre mixte, 21 juillet 2023, 21-17.789, Publié au bulletin

Ainsi, le délai d’intranquillité du fabricant-vendeur d’un produit vicié est considérablement allongé, dans le souci de préserver les droits et bien souvent la trésorerie d’un vendeur initial. Ce dernier, qui n’est en rien responsable du vice, le découvre parce que l’utilisateur final subit les désordres de son produit, souvent très longtemps après la revente. Il doit toutefois penser à engager la procédure en garantie contre le fabricant moins de deux ans après avoir été mis en cause.

Entreprises : comment recouvrer vos impayés ?

29 octobre 2024

Absence de paiement malgré les relances, courrier non distribué, changement d’adresse du débiteur, absence apparente de solvabilité du débiteur… Nombreux sont les créanciers découragés par les difficultés rencontrées lorsqu’ils souhaitent obtenir le paiement de leurs factures.

Pour autant, des moyens simples existent et peuvent être mis en œuvre pour y faire face.

1. La mise en demeure : première étape obligatoire

La mise en demeure est le moyen le plus simple et le moins onéreux pour recouvrer une créance. Elle prend la forme d’un courrier rédigé par l’entreprise elle-même ou par un avocat et est adressée au débiteur en recommandé avec avis de réception afin de lui rappeler son obligation de paiement.

Cet acte permet d’une part, de faire courir les intérêts de retards au taux légal dus par le débiteur. Et d’autre part, de justifier d’une tentative de recouvrement préalablement à des poursuites judiciaires.

2. La sommation de payer et la sommation interpellative : un acte officiel et probant

Lorsque la mise en demeure reste sans réponse, il est possible de délivrer une sommation de payer. Cet acte officiel est souvent plus efficace qu’une mise en demeure car considéré comme plus incitatif, dans la mesure où il est signifié par commissaire de justice (anciennement dénommé huissier de justice).

Ce dernier va mettre en demeure le débiteur de payer sa dette et l’informer des risques de poursuite judiciaire s’il ne fait pas droit à la demande de paiement. La sommation peut également être « interpellative », c’est-à-dire que le commissaire de justice recueillera la réponse du débiteur lors de la signification de l’acte. Le créancier obtiendra ainsi une preuve écrite de la position du débiteur et pourra  choisir la procédure adaptée pour obtenir poursuivre le recouvrement.

La sommation représente  un moyen rapide et peu couteux pour le créancier d’obtenir le recouvrement de sa créance.

Toutefois, dans certains cas et malgré la mise en œuvre de ces moyens, les actes ne pourront être signifiés au débiteur.

3. Faire appel à une agence de renseignements : localiser le débiteur

En effet, il est fréquent que le débiteur change d’adresse sans mettre à jour ses informations légales. Face à ces situations, le cabinet a coutume de travailler avec des agences de renseignements spécialisées. Ces agences jouent un rôle clef dans la collecte de preuves pour des contentieux commerciaux et sont souvent capables de localiser le débiteur.

La collecte d’information peut également intervenir sur le plan successoral ou financier afin de permettre au créancier de prendre une décision éclairée quant à l’opportunité d’engager ou non des poursuites judiciaires. En effet, si le débiteur est localisé mais que celui-ci demeure insolvable, la poursuite du recouvrement s’avèrera inefficace.

4. Envisager des recours judiciaires

En combinant mises en demeure, sommations et recours à des agences spécialisées, les entreprises peuvent maximiser leurs chances de recouvrer leurs dettes tout en minimisant les coûts inutiles. Toutefois si les tentatives amiables se sont avérées vaines, il pourra être opportun d’engager une procédure judiciaire à l’encontre du débiteur. L’accompagnement d’un cabinet d’avocat permettra d’analyser l’opportunité de telles poursuites, notamment la mise en œuvre d’une saisie conservatoire. Celle-ci peut débloquer la situation plus rapidement, sans nécessairement être contraint d’attendre l’issue d’une procédure au fond.

Procédure collective : la déclaration des créances antérieures

29 octobre 2024

Les procédures de traitement des difficultés des entreprises sont dites « collectives » parce qu’elles ont vocation à traiter, dans une unique procédure, l’ensemble du passif généré par la société débitrice avant l’ouverture de la procédure.  

La déclaration de créance est l’acte indispensable pour intégrer le passif d’une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.

Les conditions dans lesquelles la déclaration doit être réalisées sont définies par les articles L. 622-24, alinéa 1er, L. 631-14 et L. 641-3 alinéa 4 du Code de commerce.

Qui peut déclarer ?

En vertu de l’article L. 622-24 alinéas 2 et 3 du Code de commerce, la déclaration de créances peut être réalisée :

  • Par le créancier lui-même
  • Par tout mandataire ou préposé de son choix : le mandataire, s’il n’est pas avocat, ou le préposé doit justifier d’un pouvoir spécial écrit l’habilitant à déclarer la créance (Cass. ass. plén., 26 janvier 2001, n°99-15.153).
  • Par le débiteur, qui porte la créance à la connaissance du mandataire judiciaire et qui est présumé « avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n’a pas adressé la déclaration de créance ».

Il suffit pour cela, que le débiteur ait mentionné le nom du créancier et le montant de la créance (Cass. Com., 8 février 2023, n°21-19.330).

Quand ?

La déclaration de créance doit être réalisée dans le délai de deux mois, courant à compter de la publication du jugement d’ouverture du BODACC.

Comment réaliser la déclaration ?

La déclaration de créance doit être adressée au mandataire judiciaire (en cas de sauvegarde et redressement) ou au liquidateur (en cas de liquidation), par courrier recommandé avec accusé de réception. Celle adressée à l’administrateur judiciaire est irrégulière (Cass. Com., 22 juin 1993, n°87-19.183).

La déclaration porte sur l’ensemble des créances nées antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, c’est-à-dire les sommes échues, à échoir, les intérêts échus et à échoir, les intérêts de retard, indemnités contractuelles, clauses pénales etc … (article L. 622-25).

La déclaration de créance doit également mentionner le privilège ou la sûreté détenu par le créancier, en garantie de sa créance (article L. 622-25). A défaut, la créance sera inscrite au passif à titre chirographaire (Cass. Com., 4 février 1992, n°90-13.962).

Selon l’article R. 622-23 du Code de commerce, la déclaration de créance doit également contenir :

  • « Les éléments de nature à prouver l’existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d’un titre ; à défaut, une évaluation de la créance si son montant n’a pas encore été fixé ;
  • Les modalités de calcul des intérêts dont le cours n’est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté ;
  • L’indication de la juridiction saisie si la créance fait l’objet d’un litige.

À cette déclaration sont joints sous bordereau les documents justificatifs »

À défaut, le mandataire judiciaire pourra contester la créance déclarée.

Pourquoi déclarer ?

Seule la déclaration de créance permet au créancier antérieur d’intégrer le passif du débiteur placé en procédure collective.

Le créancier qui n’a pas déclaré sa créance, dans le délai prévu par l’article L. 622-24 du Code de commerce, sera forclos.

En sauvegarde et en redressement, la créance non déclarée sera inopposable au débiteur pendant l’exécution du plan et à l’issue du plan si les engagements ont été respectés par le débiteur (L. 622-26 et L. 631-14).